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Revue n° 9 - (septembre 2004) pages 41 et 42 |
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Septembre 1939 "Le Jugement de la femme par l'homme" Huile sur toile 0,55 x 0,75 m Collection particulière Roger Toulouse et le divan par Hubert de la Rochemacé, psychanalyste Ma rencontre avec Roger Toulouse est peu banale puisqu'elle s'est effectuée comme psychanalyste derrière le divan d'un de mes patients. C'est d'abord par les mots puis par ma rencontre avec la peinture, et enfin par la poésie que je suis rentré en résonance avec cet artiste. Si la cure psychanalytique s'effectue entre deux protagonistes, la plupart du temps un troisième personnage est convoqué dans le discours du patient, la psychanalyse est "un ménage à trois". Roger Toulouse a été à l’occasion ce troisième personnage pour ce patient et j'ai par conséquent approché son œuvre par le filtre d'un double transfert. Celui du patient vis-à-vis de son analyste, et celui, dit "sauvage", de ce patient vis-à-vis de Roger Toulouse lui-même. Le terme de transfert n'est peut-être pas approprié en l'espèce pour ce second terme car ce patient a établi une relation réelle et non pas imaginaire vis-à-vis du peintre. Ils se connaissaient et étaient bons amis. C’est par conséquent comme analyste que j’ai soutenu cette rencontre imaginaire, avec le souci tout de même de repérer les formations réelles de l’inconscient produites dans la cure. C'est par mon silence, dans l’écoute des mots de mon patient, et dans la lettre que j'ai rencontré le peintre. Bien entendu il ne s'agit pas de relater le contenu du discours de ce patient vis-à-vis de son ami, mais de témoigner de la singularité d'une telle rencontre. Roger Toulouse m'est apparu comme un homme de lettre, non pas comme on pourrait l'entendre un homme lettré, même s'il le fût, mais un homme de lettres, c'est à dire un homme doté d'un inconscient, constitué de signifiants et de lettres, selon l’acception lacanienne. Ce n'est que dans un second temps que je me suis intéressé à sa peinture, avec deux belles expositions dont l'une, celle de 1995, au musée des Beaux-Arts d'Orléans qui m'a ébloui, littéralement transporté (autre nom pour le transfert) et l'autre, celle de Beaugency en octobre 2000. Elles m’ont amené à porter mon intérêt pour son œuvre. Ce qui m’a surpris d’emblée chez Roger Toulouse c’est la place qu’il consacre au vide. Je pense notamment à ses sculptures, ses dessins à l’encre sur papier, ses collages sur isorel. Pour paraphraser un psychanalyste, D.W. Winnicott, c'est la capacité d'être seul, ou la solitude comme remède à la dépression qui m'étonnent chez lui. La peinture, comme l'écriture est un art solitaire. Roger Toulouse savait être seul pour travailler. En cela il avait atteint très probablement un point de maturité et de plénitude qui lui permettait de rencontrer l'autre dans la toile (les portraits de ses amis) et de se soustraire à la capture réelle d'autrui. Il savait se déprendre des contingences de la vie pour se consacrer à son œuvre. Pour autant il était en prise avec son époque et son silence ne doit pas être interprété comme une démission du corps social mais bien comme une position subjective particulière, éthique. Son œuvre ne témoigne-t-elle pas de ses angoisses vis-à-vis du monde contemporain qu’il ne comprenait pas toujours ? Roger Toulouse s’apparente au mystique, au moine, qui s’inspire dans la contemplation pour prier, ou bien à l'artiste, ou l’écrivain, qui a besoin d’être seul pour créer. Sa peinture et ses poèmes relatent parfaitement ce rapport au monde très particulier de l’artiste. Chaque tableau isole un personnage. Point de groupe, de foule, de situation à plusieurs, hormis quelques œuvres où des personnages composent la toile. Mais quand bien même, il n’y pas ou peu de rapports entre eux comme dans la toile : "Le Jugement de la femme par l’homme" de septembre 1939. Roger Toulouse établit un rapport très particulier à l’autre, rapport binaire entre l’artiste et son personnage qui se duplique entre le spectateur et le portrait. Ce peintre est avant tout un portraitiste, il exclut toute approche "transitiviste". J’appellerai transitivisme ici la présence de l’autre dans la toile, qui vient créer de l’envie, l’invidia décrite par Saint Augustin dans ses confessions. En évitant le tiers, l’artiste n’évite-t-il pas ainsi de représenter l’agressivité, la jalousie, le désir, propre à l’homme ? Lorsqu’ils sont plusieurs, les personnages dans ses tableaux ne se regardent pas, ils sont distants et froids les uns envers les autres comme dans "Quatre Femmes devant le cimetière" de 1939.
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Quatre femmes devant le cimetière -1939 Huile sur toile - 0,380 x 0,555 m Collection particulière |
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Même dans ses tableaux sur la guerre, il faut le support du titre de la toile pour imaginer la destruction, la folie de l’homme. Il existe chez Roger Toulouse une position que je qualifierai d’autistique, c’est-à-dire de repli sur soi, d’introversion, où l’inspiration dépend du monde intérieur, même si l’inspiration provient de l’environnement. Cela confère à l’œuvre une tonalité grave, peut être dépressive. J’ai été frappé de la gravité ou de la tristesse des personnages et des thèmes abordés à la fin de sa vie. L’œuvre de Roger Toulouse est empreinte de sérieux, les personnages ne rient pas, ils sont pris par des forces obscures mystérieuses. La peur, l’angoisse de l’homme dans le monde peut-être ?
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Septembre 2004
Propos de Serge Grouard
Maire d’Orléans, Député du Loiret
Editorial lire l’article
Hommage à Roger Toulouse pour le 10ème anniversaire de sa disparition
Quelques amis de longue date
A l’Auberge des quatre routes
(Hélène Cadou)
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Roger et Marguerite, le don de l’accueil
(Bernard Foucher)
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Rencontre avec Roger Toulouse
(Pierre Garnier)
Mes premières rencontres avec Roger Toulouse
(Hélène Henry)
Un amour vrai
(Raymond Leclerc)
Un souvenir de Marguerite Toulouse
(Jean-Louis Gautreau)
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Le Soleil dans la tête
(Jean-Jacques Lévêque)
Roger Toulouse comme nous l’avons connu et aimé
(Bernard et Yvonne Richard)
Triple rencontre
(Christiane Roche)
Hommage à Jean Rousselot
(Abel Moittié)
Rencontre
(Jean Rousselot)
Aller à la chasse avec Roger
(Jean Rousselot)
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Ce beau sourire
(Anne Sourcis)
Témoignages d'anciens élèves
Tout a commencé en septembre 1960
(Jean-Louis Gautreau)
Du maître à l’ami
(Michel Kister)
Triangles, mystères et boules de gomme
(Jacky Leloup)
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« Tu vois, mon vieux, il ne faut pas être trop pressé »
(Jean-Claude Longuet)
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Il ne l’a pas connu, mais il a rencontré son œuvre
Roger Toulouse et le divan
(Hubert de la Rochemacé)
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Au musée des Beaux-Arts d’Orléans : une exposition de portraits réalisés par Roger Toulouse
Texte d’introduction et catalogue de l’exposition
(Isabelle Klinka-Ballesteros)
Etude d’une œuvre retrouvée
Nature morte à l’œuf
(Jean-Louis Gautreau)
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Documentation sur Roger Toulouse et son œuvre
Divers prix, récompenses et décorations reçus par Roger Toulouse
Les œuvres de Roger Toulouse dans les musées français
Les lieux portant le nom de Roger Toulouse dans le Loiret
Vie de l’association
Les évènements de l’année
Les œuvres retrouvées
Nos amis ont publié
Le courrier des lecteurs
Les ouvrages disponibles
Composition du bureau
Bulletin d’adhésion
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